Aujourd’hui, je vous parle d’un livre qui n’est pas franchement une nouveauté : Devenir, l’autobiographie de Michelle Obama. C’est un livre que vous avez certainement déjà vu passer puisqu’il est sorti en France il y a cinq ans. Surtout qu’il a bénéficié d’une sacrée couverture médiatique ! Et justement, c’est un peu ce qui m’avait freiné. A force d’entendre parler d’elle, de la fin du mandat de son mari et de la voir partout dans les médias, j’avais l’impression que le livre n’avait pas grand chose de plus à dire. Pourtant, il faut bien que j’avoue que les retours sur ce livre ont été plutôt bons. Dans l’ensemble, le livre a reçu un très bon accueil. Mais une fois l’enthousiasme retombé, que reste-t-il d’un livre qui a fait un tel buzz ? Je me suis posé la question, et c’est un des éléments qui m’a finalement envie de lire cet ouvrage.
Mon résumé du livre
Pendant huit ans, elle a été une des personnalités les plus scrutées de la planète. Le moindre de ses déplacements, la moindre de ses prises de parole a été analysé, politisé et critiqué. Pourtant, indépendamment de son statut de première dame, Michelle Obama a sa propre carrière. Et ce n’est pas parce qu’elle a dû faire profil bas pendant huit ans qu’elle n’a pas des choses à dire. Au contraire : ce statut de témoin privilégié de l’administration Obama lui a donné une position unique pour observer les transformations de la société américaine de ces dernières années. Une société dans laquelle la place des femmes, et des femmes noires en particulier, n’a toujours rien de confortable. Et le microcosme politique en est à lui seul un bon exemple, comme elle a pu en faire l’expérience.
Mon avis sur Devenir
Quand je me lance dans la lecture d’une autobiographie, je garde toujours un esprit très critique. Plus critique qu’avec une oeuvre de fiction. Déjà parce qu’on n’est jamais certain que le livre a vraiment été écrit par la personne. Et dans le cas présent je pense qu’il est le fruit de longs entretiens mis en forme par une tierce personne. Mais aussi parce que la personne qui prend la parole le fait forcément pour une raison précise. Et elle cherche généralement à se montrer sous son meilleur jour.
Ce que j’ai apprécié en premier lieu avec Devenir, c’est que Michelle Obama échappe un peu à cette tendance. Et après un début très « américain » dans lequel elle met en scène son retour à la vie normale après la Maison Blanche, elle passe rapidement à son enfance. Dès ce retour en arrière, on voit bien qu’elle se soucie assez peu de coller à un archétype de femme forte. Et elle s’intéresse plutôt au contexte social et racial dans lequel elle a grandi. Un contexte qui explique beaucoup d’éléments de sa personnalité, à commencer par son tempérament combatif et ambitieux. Des aspects qui l’ont porté, mais qui lui ont aussi parfois causé du tord, comme elle l’explique très bien elle-même.
Elle jette un éclairage très intéressant sur l’Amérique de sa jeunesse. Au lendemain des années 1960, les décennies 70 et 80 ont été très inégales. Certes, de nouvelles opportunités s’ouvraient pour les afro-américains et pour les femmes, deux catégories qui avaient toujours été traitées comme des minorités auxquelles il était normal de refuser certains droits. Mais la violence était toujours présente. Et a présent que Martin Luther King et les frères Kennedy n’étaient plus là pour défendre une vision progressiste de la société américaine, la perte de modèles inspirants a laissé toute une génération orpheline.
Pour la lectrice française que je suis, toute cette première partie de Devenir est riche en informations et en enseignements. Je m’intéresse pourtant beaucoup à l’histoire politique américaine moderne. Mais ce livre m’a plongé dans le quotidien. Et je trouve que c’est vraiment le gros point fort de Michelle Obama : elle est capable de nous raconter l’histoire à hauteur d’hommes et de femmes. De nous faire nous sentir à l’aise dans ce quotidien très différent du nôtre. Et elle explique clairement quels sont les obstacles qu’elle a dû franchir sur sa route.
Sa carrière professionnelle est ensuite un sujet très intéressant. Elle ose parler de ses ambitions professionnelles, pas seulement en terme de réussite sociale, mais aussi pour les défis intellectuels que ça représentait pour elle. Elle n’hésite pas à évoquer la question de la sécurité financière, un sujet qui a dirigé beaucoup de ses choix puisqu’elle venait d’un milieu modeste. Elle parle aussi de la difficulté de conjuguer une carrière professionnelle épanouissante et sa vie de mère. Elle évoque son rapport à la maternité dans une société américaine où on ne doit surtout pas remettre en cause la nature sacro-sainte de la famille, et où les mères sont en quelque sorte condamnées à un modèle de perfection inatteignable.
Paradoxalement, c’est la troisième partie du livre, consacré à l’élection présidentielle et aux huit années passées à la Maison Blanche, qui est la moins intéressante. Si vous avez un peu suivi les infos, vous savez déjà l’essentiel. Et il y a peu à apprendre. Oui, on découvre les coulisses de la vie domestique dans la maison la plus célèbre au monde. Mais ça n’a rien de passionnant. Pire, c’est dans cette partie que la « politique spectacle » à l’américaine s’invite dans l’écriture. On sent bien que Michelle Obama défend son mari, son bilan politique. Elle se défend aussi des attaques dont elle a été l’objet. Je comprends que de se prendre des coups médiatiques pendant huit ans a dû être usant et frustrant, surtout pour une femme intelligente qui n’a pas peur de faire entendre sa voix. Et le devoir de réserve de la première dame a certainement été très pénible. Mais cet aspect un peu « règlement de comptes » ne m’a pas franchement emballé. Il est tellement moins intéressant que le reste des sujets évoqués dans l’ouvrage.
Devenir : une idée lecture pour qui ?
Si vous avez hésité, comme moi, à vous plonger dans les pages de Devenir, je vous conseille de vous lancer. Parce que même s’il y a des longueurs sur la fin, ça reste une lecture très intéressante. J’ai été frappé par la sincérité avec laquelle Michelle Obama aborde autant de questions sociales, et notamment au regard qu’elle porte sur la nécessité de soutenir encore et toujours l’émancipation des femmes jeunes filles et des femmes. D’après elle, on n’en fait toujours pas assez en matière d’accès à l’éducation et d’opportunités professionnelles. Je suis bien d’accord, et j’ai apprécié qu’elle utilise son livre pour défendre avec ardeur l’éducation comme vecteur de transformation de notre société.
Elle parle beaucoup de l’importance de mener une vie normale à ses yeux. Et elle admet volontiers qu’elle n’y arrive pas, la plupart du temps. Elle ose parler de ses échecs, des nombreux moments de doute, et elle a l’élégance de ne pas trop tirer sur la corde sensible pour raconter son histoire. Ce sont des éléments qui rendent la lecture très plaisante. Ils démontrent aussi qu’elle n’a pas été une simple spectatrice de la carrière de son mari. Plus qu’une épouse et une mère dévouée, elle a été l’artisan principal d’une autre aventure, plus discrète celle-là : celle d’une vie de famille dont elle a assuré la cohérence tout en poursuivant les projets professionnels qui lui tenaient le plus à coeur. Elle n’a pas réussi à tout faire, mais elle a toujours eu la force d’essayer. Et je pense que c’est un fabuleux message à partager avec tous les lecteurs, hommes et femmes, américains ou français, qui se retrouveront forcément un peu dans ce parcours de vie incroyable.
Comme toi, j’ai beaucoup apprécié cette lecture. J’ai trouvé que c’était une mine d’informations sur le racisme des années 70 et 80 aux Etats-Unis (période que je connaissais un petit peu mais pas assez à mon goût). Ce que j’ai aussi aimé dans cette lecture c’est la plume, elle est fluide alors que je craignais de devoir lire quelque chose d’extrêmement lourd 😉
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Comme tu le soulignes, c’est effectivement un livre agréable à lire, et pas trop dense malgré son grand nombre de pages. Merci pour ton avis !
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