Lucy Maud Montgomery est l’une de mes romancières préférées, et je l’aime d’autant plus que ça fait maintenant vingt ans que je lis et relis ses livres ! J’avais à peine une dizaine d’années quand j’ai lu pour la première fois Anne, la maison aux pignons verts qui est le premier tome d’une fabuleuse saga centrée sur le personnage d’Anne, jeune orpheline qui va trouver sa voie et construire sa vie. Le dernier des huit tomes de cette très belle fresque présente l’adolescence de Rilla, la plus jeune des filles d’Anne. Un roman magnifique qui se déroule en plein coeur du Canada pendant la Première Guerre mondiale. Et malgré la gravité des événements, Rilla d’Ingleside possède les même qualités d’humour et de lumière que les précédents livres. Une bonne raison de vous faire découvrir cet excellent roman !
En cette année 1914, Rilla vit une vie très paisible et même assez privilégiée dans la petite bourgade de Glenn St Mary. Dernière fille du docteur de ce charmant petit port de pêche, Rilla n’a jamais connu la moindre difficulté. La jeune fille, assez vaniteuse, n’a aucune ambition et se laisse porter par les plaisirs de la vie, tout comme les autres filles de son âge. Mais lorsque la rumeur de la guerre commence à parvenir au Canada, les garçons de son âge ne tardent pas à parler de s’enrôler. La vie bascule alors : les frères de Rilla s’enrôlent les uns après les autres et la vie au village n’a plus à rien à voir. L’euphorie et la confiance du début laissent la place à la peur et à la résignation. De son côté, Rilla prend conscience qu’elle va devoir participer à sa manière à l’effort de guerre. Le destin force un peu les choses en plaçant sur sa route un nouveau-né, orphelin de guerre, dont elle va devoir s’occuper. Il es temps pour Rilla de se montrer courageuse, d’autant que la guerre n’est pas prête de finir…
Rilla d’Ingleside est le huitième tome de la série de romans écrits par Lucy Maud Montgomery. Pourtant, il n’y a pas besoin d’avoir lu les autres livres pour tout de suite se repérer parmi les personnages et comprendre l’intrigue. D’autant qu’à l’inverse des autres livres, ce n’est pas Anne qui est le personnage central mais Rilla, sa fille. On repart donc de zéro ou presque !
A bien des égards, Rilla d’Ingleside est un roman vraiment à part dans le paysage littéraire. C’est l’un des seuls romans à avoir été écrits pendant la Première Guerre mondiale et à traiter du sujet. Ce livre n’est donc pas un roman historique au sens stricte du terme : la romancière n’a pas cherché à parler de la guerre, elle a simplement parlé de son quotidien qui se trouvait être marqué par la guerre. Au moment où elle écrit son livre, Lucy Maud Montgomery ne sait pas quand la guerre finira ni qui gagnera. On a donc une vision très fidèle de l’incertitude dans laquelle les gens étaient plongés et de tout ce que ça impliquait dans le quotidien, notamment la montée du patriotisme.
Peut-être que c’est parce que le livre a été écrit « dans le feu de l’action » qu’il ne ressemble pas vraiment à un roman sur la guerre. Le véritable sujet du roman, c’est le thème de l’émancipation. Rilla est une adolescente très éloignée des contingences de la vie quotidienne. Elle a été très protégée dans son enfance et n’a jamais eu à fournir beaucoup d’efforts. L’épreuve de la guerre, le fait que sa famille soit frappée de plein fouet, va la pousser à grandir et à se montrer plus responsable, plus lucide sur le monde qui l’entoure. En cela, ce roman est un formidable portrait féminin qui touchera plus d’une lectrice.
Et bien sûr, on retrouve au passage tous les éléments qui font de Lucy Maud Montgomery une formidable romancière, à commencer par son sens de l’humour, sa chaleur et sa poésie (je pleure à chaque fois que le relis le livre quand j’arrive aux pages sur le chien Lundi). Elle est très douée pour raconter l’ambiance domestique de la vie de famille. Ses personnages sont toujours très savoureux, à commencer par Susan, la bonne à tout faire de la famille qui n’a pas sa langue dans sa poche. On rencontre aussi un pasteur loyal, une cousine Sophia particulièrement défaitiste, les bigotes du village, et un voisin désagréable au possible. Impossible de résister à tout ce charmant petit monde qui forme un microcosme dans lequel on a envie de partir en vacances.
Chez Lucy Maud Montgomery, la gravité est toujours compensée par l’humour. L’équilibre est toujours là pour bien montrer que, quelles que soient les épreuves de la vie, l’espoir est toujours possible. Ce formidable message raisonne particulièrement à notre époque, et je trouve que ce roman, malgré quelques pages un peu désuètes, n’a rien perdu de son intérêt ni de son charme.
Si vous avez envie de vous plonger dans les pages d’un bon roman réconfortant avec une excellente histoire et des personnages attachants, le tout servi par une plume de très grand talent, je dirais que Rilla d’Ingleside est le roman qu’il vous faut.
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