La maison de Balzac est l’une de mes maisons d’écrivain préférées, notamment à cause de sa situation géographique et de ses nombreuses bizarreries. Situées en plein cœur du très select XVIe arrondissement, cette jolie maison dévoile une bulle d’anachronisme au beau milieu de Paris. Réchappée d’une époque au charme désuet, elle lutte vaillamment contre la modernité architecturale du reste du quartier. Elle continue d’observer la Seine couler et les parisiens courir en tous sens. Le plus étrange, c’est que la rue où elle se trouve (la rue Raynouard) a été construite après la maison, ce qui fait que la rue… est au niveau de la toiture ! On devine à peine la présence de la maison quand on arrive en longeant le trottoir, et il faut descendre les escaliers pour atterrir dans le jardin et atteindre la maison. Mieux : en passant par derrière, on découvre la ruelle sur laquelle débouchait le passage secret que Balzac empruntait pour échapper à ses créanciers ! Bref, cette maison transformée en musée recèle bien des trésors, et chaque occasion d’aller la visiter est bonne à prendre. D’ailleurs justement, le musée accueille en ce moment une exposition très intéressante.
« Balzac et les artistes » : plus que le titre de l’exposition temporaire qui se tient au musée Balzac, c’est carrément un voyage dans le temps qui se propose à nous. Balzac, de son vivant déjà, était considéré comme un personnage à part, pas un auteur comme les autres. Il avait une aura comme on disait encore en ce temps-là. La faute au caractère plus grande que nature du bonhomme, au succès de son œuvre, mais aussi tout simplement à l’ampleur inégalée de son œuvre. La Comédie Humaine, c’est du très lourd !
Balzac participait à la vie artistique de Paris, croisait Victor Hugo, allait en villégiature à Nohant chez Georges Sand, et d’une manière générale se passionnait pour quasiment toutes les formes d’art. Sa curiosité intarissable a forgé une partie de son œuvre, façonné sa vision du monde, et lui a permis de déployer un monde imaginaire phénoménale en faisant vivre dans la Comédie Humaine une humanité entière reproduite à l’échelle du roman. Ce qui n’est pas rien. Là où ça devient encore plus intéressant, c’est que les liens entretenus par Balzac avec les milieux artistiques ne se lient pas seulement dans ses romans ; on les voit aussi dans la manière dont Balzac a pu être représenté par les autres au fil des années puis des siècles. Balzac détient une place à part dans l’inconscient collectif, et notre vision de lui est largement due à ces représentations de lui qui nous sont parvenues.
Avec son exposition temporaire « Balzac et les artistes », le musée Balzac propose aux visiteurs de replonger au cœur de la création artistique, mais aussi au cœur même de la définition d’un écrivain. De nombreux documents sont là pour baliser le parcours à la redécouverte de Balzac. C’est aussi l’occasion de redécouvrir le cabinet d’écriture après sa restauration complète. C’est là que Balzac a écrit l’essentiel de son œuvre. Forcément un lieu à part pour les lecteurs.
L’exposition a débuté en juin et elle se tient jusqu’au 2 octobre. Le prix d’entrée est de 5 euros (ce qui est fort raisonnable, Balzac aurait apprécié). Bonne visite à tous !