Tous les livres sont-ils vendus en librairie ?

Le mois dernier, on m’a posé une drôle de question sur le blog : tous les livres sont-ils vendus en librairie ? Je dis drôle de question, parce que pour moi la réponse est évidente. En fait, je me suis vite rendue compte que beaucoup de lecteurs se posaient secrètement cette question. Ce que je prenais pour une évidence n’en était finalement pas une. Aujourd’hui, je vous propose donc de faire un point sur la disponibilité des livres en librairie, histoire de savoir (enfin !) à quoi s’en tenir.

  • Comment fonctionne une librairie ?

Commençons par le commencement. Une librairie peut être généraliste ou spécialisée. Par exemple : une librairie jeunesse, une libraire polars, une librairie pour les livres étrangers… Dans les librairies spécialisées, a priori vous ne trouverez que les livres en accord avec le thème choisi. Mais les libraires peuvent quand même commander d’autres genres de livres. C’est juste qu’ils n’auront peut-être pas assez de connaissances dans d’autres domaines pour bien vous conseiller.

Dans une librairie généraliste, vous pouvez trouver tous genres d’ouvrages : des romans, des livres adultes et parfois jeunesse, des dictionnaires, des ouvrages historiques, des essais, des guides de tourisme… La seule limite, c’est le nombre de mètres carrés ! Dans la ville où je vivais avant, le libraire proposait une étagère de romans en anglais pour faire plaisir à ses lecteurs amateurs de VO. Mais j’avoue que c’est très rare.

  • La sélection des livres en librairie

Les librairies ne sont pas comme les tentes dans Harry Potter : l’espace n’est pas extensible par magie ! Du coup, faute de place, les libraires ne peuvent évidemment pas présenter TOUS les livres. Leur stock est également limité, donc ils n’ont généralement pas 10 exemplaires d’un même livre. Comment choisissent-ils les livres qu’ils présentent sur les tables et les étagères ? En général, il y a un équilibre entre les livres qui se vendent le plus (les oeuvres au programme des collèges et lycées mais aussi les best-sellers) et les livres que le libraire veut défendre auprès de ses clients. Un libraire connait aussi bien ses lecteurs fidèles. Il est capable de repérer des tendances, et de voir ce qui est susceptible de plaire. C’est donc tout une alchimie qui préside à la sélection des livres mis en avant dans la librairie.

  • Que faire quand on ne trouve pas un livre en librairie ?

Pour toutes les raisons que je viens de citer, il est possible qu’un livre que vous cherchez ne soit pas chez votre libraire préféré. Que faire alors ? Pas de panique ! Si votre libraire n’a pas le livre qui vous intéresse, il peut le commander ! Les libraires ont la possibilité de faire des commandes individuelles auprès des centrales de distribution. C’est-à-dire qu’ils commandent un ouvrage à l’unité, et ils le reçoivent généralement sous quelques jours. Quand le livre est expédié en librairie, vous ne payez pas de frais de livraison. Seulement le prix normal de votre livre. En revanche, si vous souhaitez être livré chez vous, il vous faudra participer aux frais d’expédition. Depuis la crise du COVID-19, le gouvernement a mis en place une aide à l’expédition spéciale pour le secteur du livre. Les librairies facturent 1 centime pour l’expédition d’un livre à domicile. Un prix très raisonnable !

  • Tous les livres sont-ils commandables ?

Ici, je crois qu’on arrive au coeur du sujet. Quand on m’a posé la question pour savoir si tous les livres étaient vendus en librairie, la discussion portait sur les romans féminins. Et je pense que le sous-texte de la question c’était : est-ce qu’on peut aussi trouver des « romans pas sérieux » en librairie ? Je mets l’expression entre guillemets car je crois que beaucoup de lecteurs font une distinction entre ce qui serait « la grande littérature » (les classiques plus la sélection du Goncourt, en gros) et la littérature de divertissement. Et là, il faut bien comprendre en fait que beaucoup de lecteurs ont peur d’être mal jugés en fonction de leurs goûts. Comme si certaines lectures valaient moins bien que d’autres. Comme si lire un Harlequin, c’était moralement inférieur au fait de lire du Victor Hugo.

Alors là, je vais faire un point très clair sur le sujet et redire ce que j’ai déjà exprimé à de nombreuses reprises dans les pages de ce blog. Non, il n’y a pas de différence fondamentale entre lire un Harlequin et lire du Victor Hugo. Et tant pis pour les personnes que cette déclaration fera bondir. On lit pour le plaisir, pour SE FAIRE PLAISIR. Il ne s’agit pas de jugement. Si vous voulez briller dans les dîners en ville, alors vantez-vous de lire des livres que vous aimez, qui vous font passer un bon moment. Déclarer à l’emporte-pièce que Proust c’est formidable en ne l’ayant en fait jamais lu, c’est bien pour amuser la galerie, mais à part donner des complexes d’infériorité aux véritables lecteurs, ça ne fait pas beaucoup avancer la littérature ! Lire des classiques ou des ouvrages contemporains plus « sérieux » peut être un grand plaisir… à condition que ce soit volontaire.

Le message important que je voudrais faire passer, c’est que pour les libraires, un livre est un livre. Ils gagnent autant d’argent avec la vente d’un Harlequin que d’un Victor Hugo. Voilà pour la réalité économique. Ensuite, humainement, les libraires ont beaucoup plus d’intérêt à accompagner des lecteurs satisfaits de leurs lectures, plutôt que de perdre des gens qui n’osent pas franchir le seuil de leur librairie.

DONC : si vous aimez les ouvrages de divertissement (Harlequins, thrillers, comics, mangas, ouvrages de pâtisserie…), sachez que les libraires sont AUSSI là pour vous. S’ils n’ont pas le livre que vous voulez, ils peuvent vous le commander. Et aucun libraire digne de ce nom n’osera jamais juger un lecteur sur ses choix d’ouvrages. Si vous avez envie de vous lancer dans l’intégrale de Barbara Cartland, tant mieux pour vous… et pour le libraires, car ça veut dire qu’il va vous vendre un paquet de livres ! Et d’ailleurs, je n’en ai jamais lu, mais il y a peut-être de belles découvertes à faire, qui sait ?

Je voudrais vous dire de ne pas vous sentir mal à l’aise face à un libraire. Être libraire, ça ne veut pas dire être snob. Au contraire, ça veut dire transmettre une passion, être un passeur, valoriser la curiosité et l’ouverture d’esprit. Autant de principes qui devraient toujours être au coeur de notre définition de la culture.

J’espère que cet article aura répondu aux questions que certain(e)s d’entre vous pouvaient se poser. Et qu’il aura aussi remis les pendules à l’heure. Je suis ravie de constater l’engouement formidable qui a permis, pendant l’année 2020, de maintenir les librairies à flots. Contre toute attente, l’année n’a pas été aussi mauvaise que prévue pour nos librairies indépendantes. Mais le chemin est encore long avant que tout le monde se sente à l’aise dans ces espaces de partage. Si vraiment vous n’osez pas passer commande d’un livre en librairie, n’oubliez pas qu’il existe le site internet des librairies indépendantes : LesLibraires.fr. Vous pouvez commander n’importe quel livre en France, et vous faire livrer chez vous pour seulement 1 centime la livraison. Et comme le prix du livre est fixe en France, pas de mauvaise surprise.

Belle lecture à tout le monde !

13 réflexions sur “Tous les livres sont-ils vendus en librairie ?

  1. Light And Smell dit :

    Article intéressant 🙂
    En revanche, en tant que lectrice, j’ai quand même assisté à plusieurs conversations entre librairies qui se moquaient ouvertement, une fois le client parti, de ses choix de lecture. Un « et voilà qu’elle est encore venu chercher un Levy de merde » m’a fortement marquée.

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    • Yannick dit :

      Malheureusement, il y a des imbéciles dans toutes les professions, même si, généralement, un peu moins chez les libraires et les bibliothécaires, car la lecture apporte ouverture d’esprit, empathie et tolérance puisque chaque livre nous permet de découvrir et de partager la vie d’autres que nous et donc de mieux les comprendre.

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      • Alivreouvert dit :

        c’est vrai que c’est particulièrement un comble dans ces professions de ne pas faire preuve d’ouverture d’esprit. J’ai croisé peu de gens du monde du livre qui soient à ce point irrespectueux des goûts de lecture des autres. L’attitude décrite dans le commentaire est d’autant plus dommageable que c’est un coup à faire fuir les gens et à les renvoyer sur internet acheter leurs livres. Mais vous avez raison, ça reste un cas particulier, pas la norme, et les libraires ainsi que les bibliothécaires sont avant tout des gens passionnés qui essayent de répondre au mieux aux attentes de tous les lecteurs.

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      • Light And Smell dit :

        Vu le métier et l’ouverture d’esprit qu’on lui associe, les mauvais comportements, même minoritaires, tendent à marquer un peu plus que dans d’autres professions… Mais je ne doute pas que beaucoup ne partagent pas cet état d’esprit 🙂

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    • Alivreouvert dit :

      les jugements de valeur restent très présents en France quand il s’agit de lecture. Quand j’étais à l’université, en filière Lettres Modernes, j’ai entendu des commentaires semblables de la part d’enseignants. Ce n’est pas une majorité, mais ça reste présent et en tant que lectrice et bloggeuse, je me bats contre ça en essayant un maximum de promouvoir une vision bienveillante et respectueuse de la lecture. Si j’entendais un libraire dire une chose pareille, je ne me gênerais pas pour lui faire remarquer que ce sont visiblement les ventes des Levy et cie qui aident à le faire vivre. Merci beaucoup pour ton commentaire.

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      • Light And Smell dit :

        Je n’ai pas osé intervenir, mais j’ai récupéré ma commande et n’y ai plus jamais mis les pieds. Dommage, c’était une librairie indépendante…
        En tout cas, c’est tout à ton honneur de vouloir véhiculer une vision bienveillante de la lecture 🙂

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  2. Yannick dit :

    Merci pour cet excellent article. Je ferais juste un petit complément en ce qui concerne les livres auto édités qui malheureusement ne se trouvent pas tous chez les libraires car ils ne sont pas tous sur les plateformes de distribution. Ce sont les auteurs qui les distribuent, et en général, on peut les trouver dans les librairies de la région de résidence de l’auteur ou sur son site.

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    • Alivreouvert dit :

      C’est vrai que je n’ai pas listé le cas des livres en auto-édition parce que là on entre dans quelque chose de beaucoup plus complexe. Mais en général les auteurs concernés ont des sites dédiés sur lesquels on peut se procurer les ouvrages.

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  3. francefougere dit :

    En tant que lectrice, et un peu professionnelle 🙂 je déteste qu’un libraire  » me conseille », un mauvais souvenir d’un libraire autoritaire qui imposait ses choix.
    Vive la lecture libre !
    Un grand choix posé sur des tables au moins un exemplaire qu’on puisse feuilleter, les autres protégés pour l’hygiène et voilà mon bonheur !
    amitiés

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  4. Jenn dit :

    Très très bon article ! Très complet dont je partage totalement le message. La lecture, ce qu’elle a de merveilleux, c’est qu’elle est disponible pour tous. Peu importe qu’on soit grand lecteur ou qu’on lise un livre par an, et peu importe ce qu’on lit, tant qu’on lit et qu’on y trouve du plaisir, c’est le principal. Personne, et encore moins un libraire, n’a le droit de juger de ce que lisent les autres.

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