Il était un peu le monsieur Loyal des fêtes de fin d’année en Angleterre : Dickens adorait Noël ! A tel point que l’auteur britannique a consacré à Noël plusieurs de ses histoires. La plupart étaient des contes, et le plus célèbre est bien sûr Un Chant de Noël. Si vous n’avez jamais lu le livre, vous savez peut-être quand même que le personnage principal, le méchant Scrooge, est visité, le soir du réveillon de Noël, par trois esprits fantomatiques. L’histoire peut sembler faire froid dans le dos. Et c’est bien normal puisqu’elle appartient à une tradition littéraire de Noël propre aux Anglais : les histoires de fantômes ! Je sais que ça peut sembler un peu fou, mais en effet les britanniques avaient autrefois l’habitude de se raconter des histoires de fantômes pour la veillée de Noël.
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Mais au fait, d’où vient cette tradition des histoires de fantômes la veille de Noël ?
D’après le magazine du musée Smithsonian, cette tradition n’est pas propre aux pays anglo-saxons, bien qu’elle ait survécu principalement en Grande-Bretagne. Et il ne s’agit pas d’une tradition liée à Noël, mais tout simplement au solstice d’hiver. Durant la nuit la plus longue de l’année, beaucoup de culture païennes pensaient que les esprits couraient librement. Cette nuit longue et froide, à une époque où l’électricité n’existait pas encore, encourageait les gens à se rassembler tous ensemble. Et il était courant d’en profiter pour demander à un conteur de distraire l’assemblée.
Les mythes, folklores, légendes et peurs primitives du noir et de l’inconnu ont fait le reste. Et les histoires ont donc eu tendance à prendre un tour plutôt dramatique. On disait par exemple que durant la célébration de Yule, le voile entre le monde des morts et des vivants devenait si fin que les esprits des morts pouvaient franchir cette barrière invisible et visiter les vivants. D’où cette habitude d’histoires de fantômes.
Lorsque Charles Dickens publie Un Chant de Noël, en 1863, Noël n’est plus une fête très populaire. en Grande-Bretagne, ce n’est même plus une fête du tout. A cause de la révolution industrielle et des lois qui régissent le monde du travail, la majorité des gens travaillent le 25 décembre. Et seules les riches familles aristocrates suivent la mode lancée par la famille royale, qui consiste à célébrer Noël. Le succès d’Un Chant de Noël, une histoire qui rappelle les valeurs de générosité et de bienveillance liées à Noël, a permis de remettre Noël à la mode en Angleterre. Et puisqu’Un Chant de Noël est justement une histoire de fantômes, cette tradition est désormais plutôt associée à la Grande-Bretagne, alors que d’autres pays, notamment l’Allemagne et les pays nordiques la connaissaient aussi.
De nos jours, Halloween est LA fête qui accapare les histoires effrayantes. Mais il y a un détail à rappeler : les histoires de fantômes de Noël avaient moins vocation de faire peur que de rassembler. De rappeler l’importance de se serrer les coudes pour affronter les dangers et les vicissitudes de la vie. Ce n’étaient pas de pures histoires de divertissement ; elles offraient aussi une leçon à leur manière.
Alors pour rendre hommage à Dickens et son fameux Chant de Noël rempli de fantômes, je vous propose un thème de lecture autour de cette oeuvre formidable.
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Et si on (re)lisait Un Chant de Noël, de Dickens ?
En premier lieu, mon conseil est évidemment de lire Un Chant de Noël. J’ai lu le livre en version originale, mais vous le trouverez très facilement disponible en version française et en format poche. Si vous êtes d’un naturel curieux et/ou fan de Noël, sachez qu’il existe des éditions où Un Chant de Noël est tout seul. Et d’autres éditions complètes des contes de Noël de Charles Dickens. Le Chant de Noël s’accompagne alors de plusieurs autres histoires. Je ne les ai pas lu, mais je tiens de source sûre (ma mère !) que les contes sont sympas à lire. Il faut quand même souligner qu’ils ne sont pas tous aussi intéressants qu’Un Chant de Noël.
Si vous avez envie d’en apprendre plus sur l’art de célébrer Noël à la façon de Charles Dickens, n’hésitez pas à consulter mon article détaillé. Ce sera l’occasion d’en apprendre plus sur les fêtes de Noël à l’époque victorienne. En effet, c’est vraiment à ce moment-là que les fêtes de Noël ont commencé à se démocratiser, en grande partie sous l’influence du prince Albert, l’époux germanique de la reine Victoria. C’est lui qui a fait découvrir la tradition des sapins de Noël aux britanniques, et d’autres choses dont ils sont devenus fans. Il faut toutefois nuancer : à ma connaissance, ce n’est pas au prince Albert qu’on doit la tradition des pulls moches !
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Voyage à Londres : venez découvrir le musée Dickens
N’hésitez pas non plus à visiter virtuellement le musée Dickens en lisant mon article. Je l’ai visité en décembre, et la belle surprise, c’est que la maison est réellement décorée pour Noël. Il y avait un sapin avec des guirlandes et autres décorations. Sur la table de la salle à manger, la belle vaisselle était sortie, avec des décorations de Noël sur la table. Et cette ambiance festive largement participé au plaisir de ma visite !
Même sans les décorations de Noël, le musée Dickens est vraiment à voir si vous allez à Londres. D’abord parce que c’est une maison typique de la période victorienne. On retrouve l’agencement des pièces de l’époque, le beau mobilier, et la façon dont on vivait à l’époque dans ces maisons aisées.
Ensuite, on se sent vraiment partir sur les traces de Charles Dickens. La petite trouvaille qui fait mouche, c’est que régulièrement sa silhouette est peinte sur les murs, dans un couloir, sur le mur de l’escalier pour nous inviter à monter à l’étage… On sent en quelque sorte sa présence. Or, Dickens a réellement écrit plusieurs de ses histoires dans cette maison. C’est donc une atmosphère très particulière, et on n’a pas toujours le plaisir de ressentir quelque chose d’aussi profond quand on visite une maison d’écrivain.
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L’adaptation la plus folle d’Un Chant de Noël
Un Chant de Noël a fait l’objet de nombreuses adaptations. Et d’ailleurs, certaines sont vraiment excellentes. Il y a bien sûr la version avec Jim Carrey, qui mélange la captation live avec les effets spéciaux générés par ordinateurs. Mais personnellement, j’ai un énorme faible pour l’épisode spécial de Noël de la série de la BBC, Doctor Who. Cet épisode s’intitule Le Fantôme des Noëls passés, et c’est une pépite ! Globalement, il reprend bien l’histoire de base du Chant de Noël… mais en y ajoutant évidemment la patte Doctor Who. Ainsi, le docteur se fiance par mégarde avec Marilyn Monroe, et une chanteuse cryogénisée fait fuir des requins de l’espace. Mais à part ça, vraiment, tout est fidèle au livre !
Cette adaptation est fun, émouvante, poétique, surprenante, et elle plaira autant aux grands qu’aux petits. Alors si vous avez l’occasion de la visionner, n’hésitez pas : vous passerez un très bon moment. Et je pense que ça risque de vous donner envie de lire Un Chant de Noël.
(spoiler : ni Marilyn Monroe ni les requins n’apparaissent dans le livre, désolée !)
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L’idée lecture délirante : Batman Noël
L’année dernière, le tome le plus surprenant parmi les nouvelles parutions de Batman fut sans nul doute Batman Noël. Le dessinateur Lee Bermejo a eu une idée aussi géniale qu’improbable : imaginer une récriture d’Un Chant de Noël, mais avec Batman comme personnage principal !
Cette fois, exit le méchant Scrooge, c’est Batman qui est visité par les esprit fantomatiques de Noël. L’occasion de faire une petite mise au point du côté du coeur de la chauve-souris la plus célèbre de la pop-culture mondiale. A priori, l’exercice narratif ne présente pas grand intérêt. D’autant que Lee Bermejo est un dessinateur, pas un scénariste. En fait, il a eu une formidable intuition, et le mélange des deux histoires fait des merveilles.
En premier lieu, l’idée de questionner le personnage et son rapport aux autres en lui faisant « voir des fantômes » colle bien avec la mythologie Batman. Sans trop vous en dévoiler, sachez d’ailleurs que Superman en personne fait une apparition pour le moins inspirante.
Ensuite, j’ai trouvé que c’était un très bel hommage rendu au talent de conteur de Dickens, et à l’influence décisive de la littérature britannique sur la création de Batman, qui doit beaucoup au roman gothique, entre autres sources d’inspiration. L’histoire de Dickens n’a pas pris une ride. Et on peut la décliner avec presque n’importe quel personnage malheureux : le récit tient toujours. Et il tend un miroir révélateur à un personnage qui a toujours autant de choses à dire sur la souffrance humaine et la solitude.
C’est tout pour ce thème de lecture autour de Dickens ! Je sais qu’en cette soirée spéciale, tout le monde n’a pas forcément la chance d’être entouré de ses proches. Mais que vous célébriez Noël ou pas, que vous soyez seul ou avec d’autres personnes, les livres continuent de tisser du lien entre les êtres humains, présents et passés. A travers le temps et l’espace, ils nous rassemblent toutes et tous dans une formidable communauté de coeur. Ils cultivent les valeurs un peu désuètes de partage et de bienveillance, dont je crois que nous avons cruellement besoin en ce moment.
Je vous souhaite de passer une belle soirée de réveillon de Noël.
Emilie – Alivreouvert
Un Chant de Noël est mon histoire préférée de Noël alors merci pour ce chouette article et Un Chant de Noël 🙂
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Avec plaisir ! C’est une très belle histoire et j’espère que ça donnera envie à pas mal de gens de la découvrir.
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Je l’espère aussi 🙂
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Super article. Merci pour cette plongée dans Dickens. Ça me donne envie de visiter le musée maintenant 😅
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Il est très sympa à visiter, surtout en décembre. Bonne balade !!
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Super article qui m’a permis d’en savoir plus sur cette croyance autour de Noël ! Je n’ai encore jamais lu de roman de Dickens (jai un peu honte…) mais tu me donnes bien envie de lire Un chant de Noël !
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Merci pour cet article très intéressant sur le sujet ! C’est décidé, l’année prochaine je découvrirai Dickens en décembre ☺️
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