Aujourd’hui, je vous propose d’aborder un sujet dans l’air du temps : l’inclusion dans les romances. Parce que les histoires d’amour, ce n’est pas toujours un prince qui tombe amoureux d’une princesse. Et en la matière, il se passe actuellement des choses très intéressantes dans le monde de la romance. Dans les pays anglo-saxons, et dans une moindre mesure en France aussi, on commence à voir apparaître des représentations plus variées des couples amoureux. Là où ça devient vraiment intéressant, c’est que cette nouvelle vision du couple finit par avoir un impact sur la manière dont les couples hétéros sont représentés dans les romances contemporaines.

Les couples dans la littérature

Traditionnellement, on considérait que le couple dans une romance était forcément composé d’un homme et d’une femme. Je ne vais pas vous faire un pitch sur l’histoire de la représentation culturelle des couples hétéro-normés, mais pour faire simple on peut dire qu’ils sont très largement représentés dans la littérature. Une évidence historique et sociale dans la littérature occidentale. Mais maintenant les choses bougent.

Même si on a laissé derrière nous les tristes années où l’homosexualité était encore considérée comme un crime passible d’une peine d’emprisonnement (voire pire dans certains pays), la représentation culturelle dans la littérature avance moins vite que dans le reste de la société. Dans les séries et au cinéma, les couples homosexuels sont désormais mieux représentés. Mais dans la littérature, combien de romances mettent-elles en scène des couples qui ne correspondent pas aux canons hétérosexuels ? Pas beaucoup !

Quand le prince charmant… aime un autre prince charmant !

Le prince charmant s’avance vers sa belle. Il est ébloui par sa beauté. Il se penche et dépose un chaste baiser sur ses lèvres. On connait toutes et tous ce cliché narratif. C’est l’histoire la plus vieille de la fiction occidentale. Bien longtemps avant l’invention de la romance, le conte de fées à figé les règles du genre romantique. Et la première règle consistait à mettre en scène un homme avec une femme. Logique puisque c’est ce qui correspondait à la société de l’époque.

Mais de nos jours, la société a changé. Et désormais, le prince charmant peut craquer pour un autre prince. La princesse peut se sauver elle-même. Elle peut même elle aussi tomber amoureuse d’une autre jeune felle. Bref… tout a volé en éclats !

Jusqu’à récemment, l’homosexualité était principalement un sujet pour les romans généraux. Mais la romance a mis plus de temps à se saisir du sujet. Pourquoi ? C’est difficile de savoir si c’est parce que les écrivains ont mis du temps à s’adapter ou si c’est parce que les éditeurs sont restés frileux sur le sujet. Personnellement, j’ai l’intuition que c’est plutôt la seconde raison. Mais les choses bougent.

Les années 2020 vont-elles mieux défendre l’inclusion dans la romance ?

Il y a fort à parier que oui. Et d’ailleurs, la révolution est déjà en marche ! Dès 2018, les éditions J’Ai Lu ont publié la romance de Justin Myers : Roméo cherche Roméo. L’histoire de James, un gentil bloggeur qui cherche l’âme soeur à Londres, et dont les soirées blind dates deviennent le sujet de ses articles. James va finalement rencontrer le grand amour en la personne d’une star du sport, pas encore prête à révéler sa véritable orientation sexuelle aux yeux du monde.

J’avais trouvé le sujet hyper courageux. J’étais surprise qu’une telle romance soit enfin publiée en France, et d’ailleurs le roman est très drôle. Et le regard qu’il porte sur l’univers du dating actuel vaut aussi pour les couples hétéros.

Est-ce que le fait que le personnage principal soit attiré par les hommes limitent l’empathie qu’une lectrice peut éprouver pour lui ? Pas une seule seconde. Est-ce que ça fait moins rêver ? Non plus. Même quand je lis des histoires qui mettent en scène des personnages hétéro-normés, je sais bien que ce n’est qu’une fiction. Certes je me projette dans les personnages, mais ce sont les sentiments et les tempéraments qui m’émeuvent plus que leur orientation sexuelle.

Je pense que je ne suis pas la seule à penser ça car dans les pays anglo-saxons, les romances contemporaines avec des couples gays sont en plein boom. Romances contemporaines et romances historiques fourmillent désormais de couples homme/homme ou femme/femme. Et c’est fabuleux car c’est l’occasion d’explorer de nouveaux sujets en rapport avec l’identité de chacun, ses désirs et les dynamiques de couples.

Les romances gays au pays des best-sellers

C’est la leçon que les maisons d’édition ont fini par tirer de certains succès de librairie ces dernières années. Par exemple, vous êtes certainement passé près d’un exemplaire du roman de Casey McQuiston : My Dear F***ing Prince. Je ne suis pas fan du tout de ce titre français (qui ne l’est pas !). Mais la saga a eu un formidable succès. Le pitch ? Le fils de la présidente des Etats-Unis tombe amoureux du prince d’Angleterre. Un genre de coup de foudre façon Harry et Meghan… mais sans Meghan !

En France, le roman n’a pas bénéficié du même succès qu’aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, où il a vraiment fait le buzz. Une comédie romantique qui en plus ose toucher à la famille royale ? So chocking ! En fait, c’est surtout un excellent divertissement, qui en profite pour poser une question pas si bête que ça : que ce passera-t-il le jour où un héritier du trône préfèrera les hommes ?

Et du côté des romances plus « traditionnelles » ?

Là où je veux en venir, c’est que cette nouvelle vague de romances ne se soucie plus de l’orientation sexuelle de ses personnages. En version originale, il y a des dizaines de livres que je pourrais vous conseiller. Mais ce qui est encore plus intéressant, c’est de voir de quelle manière cette nouvelle vision du couple impacte les romances plus « traditionnelles », avec des couples hétéro-normés.

Du côté des hétéros, les clichés volent en éclats. Et on s’émancipe des vieilles dynamiques pour proposer une nouvelle vision du couple moderne. Dans Les Hommes virils lisent de la romance, Lyssa Kay Adams imagine un club de lecture réservé aux hommes. Leurs lectures fétiches ? Des romances pour mieux comprendre l’esprit féminin ! Je n’ai pas lu le livre, et il semble malgré cette bonne idée de départ, le roman soit un peu décevant. Mais l’idée de détricoter l’image traditionnelle de la virilité me plait beaucoup !

Est-ce que l’orientation sexuelle d’un personnage de romance compte vraiment ?

J’ai déjà eu l’occasion de l’évoquer dans un article précédent, l’image du prince charmant a beaucoup évolué ces dernières années/décennies. Le fait que l’archétype masculin se réinvente désormais à travers une autre orientation sexuelle prouve que les lignes bougent dans la littérature actuelle. Et que les auteurs et les maisons d’édition sont prêts à prendre plus de risque pour rendre mieux compte des changements dans notre société. Il me semble d’ailleurs que c’est assez unique d’appartenir à une génération de lectrices et de lecteurs qui peuvent être témoins d’un changement aussi majeur dans l’histoire de la littérature.

Alors la question est posée : est-ce que l’orientation sexuelle d’un personnage de romance compte vraiment ? Je pense que non. Les romances sont des lectures qui reposent principalement sur leur capacité à émouvoir et à divertir leur lectorat. J’ai autant de facilité à me projeter dans un personnage féminin que masculin, alors la question de leurs préférences m’importe assez peu.

Et vous ?