Visite de la bibliothèque Sainte Geneviève

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Pour notre traditionnelle balade du samedi, je vous emmène visiter l’une des plus belles bibliothèques du monde. Elle se trouve à Paris, juste à côté du Panthéon et a été baptisée d’après Sainte Geneviève, la sauveuse de Paris face à l’invasion des Huns menés par Attila. Trônant fièrement en haut de la montagne Sainte Geneviève, la bibliothèque, rattachée aujourd’hui aux universités parisiennes, est également l’une des plus anciennes bibliothèques de Paris. Et si Paris vaut bien une messe, la bibliothèque Sainte Geneviève vaut un article dans les pages d’Alivreouvert !

Notre histoire commence avec le roi Clovis et sa femme Clotilde. Depuis que Clovis s’est converti au catholicisme, sa foi se fait sentir dans un grand nombre de ses décisions politiques, et notamment le roi est un fervent défenseur des lieux de culte. C’est lui qui ordonne de bâtir une nouvelle abbaye à Paris en 502. Cette abbaye sera fondée à l’emplacement d’un ancien cimetière où Sainte Geneviève avait l’habitude de venir prier. Elle, la courageuse femme qui s’est dressée contre les envahisseurs, est un peu la Jeanne d’Arc de l’époque. Et d’ailleurs, la reine Clotilde admire profondément la sainte. Une abbaye Sainte Geneviève est donc fondée.

Dans les murs de l’abbaye, on trouve une bibliothèque, symbole du savoir qui est alors majoritairement détenu par le clergé. Mais l’abbaye se distingue surtout car elle renferme un sciptorium, c’est-à-dire un atelier où se trouvent des moines copistes. Ce travail minutieux permet d’augmenter le nombre d’ouvrages de la bibliothèque qui prend de plus en plus d’ampleur au fil des siècles.

L’histoire de France s’écoule mais n’affecte pas trop le destin de l’abbaye qui est pourtant liée à un grand événement : lors du procès des Templiers, c’est dans l’abbaye Sainte Geneviève que la commission pontificale se réunit. Pour le reste, la guerre de cent ans et les guerres de religion freinent un peu le développement de la bibliothèque, mais elle n’est jamais menacée. Au contraire, cette bibliothèque voit son prestige grandir. Il n’est pas rare que des collectionneurs fassent des dons à la bibliothèque pour enrichir son fonds. C’est notamment le cas de Gabriel Naudé qui lègue sa bibliothèque à Sainte Geneviève (nous avons croisé le bibliothécaire personnel de Mazarin la semaine dernière lorsque je vous ai parle de la bibliothèque Mazarine).

Arrive finalement le XVIIIe siècle. La bibliothèque Sainte Geneviève est alors l’une des rares de la capitale à être ouverte au public. Elle possède des ouvrages dans toutes les disciplines, des sciences à la théologie en passant par la littérature et la philosophie. On pourrait croire que la révolution française mette en péril cet établissement mais fort heureusement il n’en est rien. Bien au contraire, la bibliothèque Sainte Geneviève va profiter des confiscations révolutionnaires puisqu’une partie des livres et ouvrages confisqués sont ensuite versés à sa réserve. Le catalogue de la bibliothèque grossit donc énormément en cette période de troubles.

Avec l’avènement d’un nouveau régime politique, la bibliothèque Sainte Geneviève, la Bibliothèque Nationale (qui se trouve alors au Louvre), la Mazarine et la bibliothèque de l’Arsenal, se voient octroyées une mission de service public. Loin d’être menacées, elles gagnent leurs galons et se voient attribués des statuts ainsi que des indemnités de fonctionnement.

Seul hic pour Sainte Geneviève, l’abbaye n’est pas destinée à survivre. Il est décidé de détruire une partie de l’établissement pour percer une nouvelle rue et fonder un nouvel établissement scolaire : le futur lycée Henry IV. Le bâtiment dans lequel se trouvent les livres, au dernier étage, est pour l’instant préservé, mais à terme la bibliothèque devra migrer.

On trouve finalement l’emplacement idéal, pas très loin du lycée Henry IV, juste à côté du Panthéon. Bonne idée, sauf que le terrain disponible n’est pas très grand et qu’il a même des dimensions très contraignantes : il s’agit d’une grande bande rectangulaire de 85 mètres de long par 21 mètres de large. Il faut se débrouiller avec ça, mais ça ne semble pas faire peur à Henri Labrouste, architecte de grand talent féru de bibliothèque (on lui doit la salle Labrouste de la BNF, plus belle bibliothèque du monde à mon humble avis !).

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Le projet prend forme et Labrouste décide de se servir de sa contrainte pour construire un imposant bâtiment rectangulaire dans lequel chaque étage aura une fonction bien précise : réserve est stockage des livres au rez-de-chaussée et salle de lecture très lumineuse au premier. Le 4 février 1851, on inaugure en grande pompe la toute nouvelle bibliothèque Sainte Geneviève. C’est alors la première fois en France qu’on construit une bibliothèque indépendante, non rattachée à un établissement officiel. Avec son style moderne et grandiose, elle séduit immédiatement le public. C’est surtout la salle de lecture qui a fait couler beaucoup d’encre car, avec son double plafond voûté et son armature métallique, elle ne ressemblait à rien d’autre à l’époque.

Depuis lors, la bibliothèque est devenue l’un des emblèmes du savoir à Paris. Rattachée aux universités parisiennes, elle accueille de très nombreux étudiants, d’autant qu’elle a gardé son catalogue pluridisciplinaire. Au total, elle compte 2 millions d’ouvrages en consultation et possède d’ailleurs une particularité amusante : une importante collection scandinave.

Au fil des siècles, cette bibliothèque a su charmer de nombreux esprits qui estiment qu’elle est la plus belle bibliothèque parisienne. Parmi ses fans, on trouve plusieurs auteurs, et pas des moindres : Balzac, Victor Hugo, Pierre Larousse (le monsieur des dictionnaires), l’irlandais James Joyce, la brillante Simone de Beauvoir, ou même encore Raymond Queneau. Tous ont écrit quelques lignes dédiés à la bibliothèque. Attirant tous les regards, la bibliothèque a aussi fait carrière au cinéma : on la retrouve dans le Adèle Blanc-Sec de Luc Besson ainsi que dans le Hugo Cabret de Martin Scorsese. Tout de même !

Si vous avez l’occasion de faire un tour dans le quartier latin, n’hésitez pas à vous rendre à la bibliothèque Sainte Geneviève. Elle est d’ailleurs ouverte pendant les journées du patrimoine pour des visites guidées.

2 réflexions sur “Visite de la bibliothèque Sainte Geneviève

  1. Blanche Mt.Cl. dit :

    Il est vrai que cette bibliothèque est magnifique et offre un choix d’ouvrages tout à fait respectable. En revanche, en tant qu’étudiante, j’ai détesté y travailler! 🙂 Je ne la trouve pas très calme et on y est vraiment assis coude à coude à certaines heures! 😉
    Et tout cas, merci de m’avoir fait redécouvrir son histoire! Très bon week-end!

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