Emma est l’un des romans les plus appréciés de Jane Austen. Alors évidemment, c’est l’un des plus difficiles à adapter car son héroïne doit être bien choisie, coïncider avec l’idée qu’on se fait d’elle, rester fidèle à l’esprit du livre, à l’opinion que le lecteur à du roman… Bref, c’est un classique auquel il est difficile de toucher ! Mais heureusement, en matière d’adaptation, les équipes de la BBC s’y connaissent ! Elles ont déjà mis leur talent au service de nombreux chefs d’œuvre de la littérature, avec notamment beaucoup de romans de Jane Austen adaptés avec brio. De là à dire que les responsables de la BBC sont de fins lecteurs, il n’y a qu’un pas. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ont pris l’habitude de faire honneur à leur sujet, et ce n’est pas cette adaptation d’Emma qui changera mon point de vue !

Emma est la fille cadette d’un riche aristocrate. Sa mère est morte de maladie lorsqu’elle était très jeune, scellant sans s’en rendre compte le sort de sa famille bien-aimée : son mari désormais veuf et hypocondriaque va devenir hyper-protecteur envers ses deux filles. Plusieurs années passent et les choses suivent leur cours, non sans bonheur. La petite famille est pour le moins heureuse jusqu’au mariage de la fille aînée. Elle part à Londres s’installer avec son mari et fonder une famille. Emma, restée seule pour prendre soin de son père, trompe son ennui en trouvant de bons partis pour ses amies. Elle joue ainsi les marieuses, non sans un certain succès. Le seul à ne pas s’enthousiasmer pour les talents d’Emma est bien monsieur Knitghley, le voisin, qui trouve qu’Emma ne devrait pas se mêler des affaires des autres. Un quiproquo amoureux mêlant plusieurs personnes devrait rapidement guérir Emma, d’autant que la pauvre va se trouver au centre de tout ce charivari, et son sens du romantisme ne pourra guère la sauver d’elle-même et de ce qu’elle a provoqué !

Cette adaptation du roman de Jane Austen en mini-série est découpée en trois superbes épisodes au charme desquels il est tout simplement impossible de résister. D’ailleurs, le format de mini-série est très bien trouvé car il laisse vraiment le temps de planter le décor et d’explorer à fond les relations de certains personnages là où le format d’un film obligerait à plus de concision et nous ferait perdre une partie du plaisir. En trois épisodes d’environ une heure chacun, nous avons toute notre dose de Jane Austen, et ça fait un bien fou !

Mise à part cette question de format, je commencerais par dire que le casting est très réussi, avec en tête d’affiche une Romola Garai solaire et tout à fait à l’aise dans le rôle d’Emma. Elle lui donne toute sa fraîcheur, son charme, sa joie de vivre et son énergie. Sous ses traits, Emma n’est pas qu’une jeune fille fleur bleue : elle devient presque une icône de féminisme et défend la condition des femmes avec beaucoup de vigueur, en faisant voir de belles à ces messieurs, et particulièrement à Knightley. Brillante et charmante, elle est irrésistible et crève littéralement l’écran. En face d’elle, Knightley est incarné par le talentueux Johnny Lee Miller. L’acteur est effectivement britannique, mais on ne peut pas dire qu’il ait un physique très « austénien ». Qu’importe car même si son choix m’a un peu surpris, j’ai eu beaucoup de plaisir à le voir dans ce rôle qui, finalement, lui convient très bien. Les autres personnages, sans trop entrer dans les détails, sont également très bien campés et plus d’un visage familier (pour les fans d’adaptations britanniques) viendra vous saluer au cours de l’histoire !

Pour en venir à l’essentiel, je pense que le motif de satisfaction le plus important dans cette mini-série, c’est l’attention qui a été portée à l’histoire. Certes, il manque pas mal des choses qui ont fait le succès du roman de Jane Austen, mais l’essentiel est là et la réalisation permet de retrouver la couleur classique sans jamais sombrer dans un rythme ennuyeux. On retrouve l’humour de Jane Austen, tant dans les personnages que dans le sel des dialogues. On retrouve aussi sa tendresse face à certains personnages. Ce mélange entre les deux, si typique de son œuvre, explose à l’écran dans une valse parfaitement orchestrée.

Emma a cette particularité de présenter une vision assez décalé du romantisme. Jane Austen nous parle des rêves d’une jeune fille qui ne sait finalement pas grand-chose du monde ou de l’amour. Sur son chemin, elle va commettre des erreurs et s’en relever pour finalement trouver sa voie. Cette réflexion, très en avance sur son temps, n’est pas seulement l’occasion pour la romancière de faire valoir un point de vue féministe. C’est aussi une opportunité pour raconter un récit initiatique, mais cette fois du point de vue d’une femme. Et la série reprend parfaitement ces deux motifs en montrant bien comment les erreurs d’Emma lui permettent de faire son éducation. En cela, je dirais que la série est très fidèle à l’état d’esprit du roman.

Evidemment, pour ce qui est des chassés-croisés amoureux, les fans de Jane Austen ont droit à leur quota de ratés et de mariages heureux. Les couples tournent dans tous les sens, réservant pas mal de surprises et de suspens. Les personnages ne sont pas tous sympathiques, mais à la fin ils remportent ce qu’ils ont mérité !

Si vous avez lu Emma, je pense que vous aurez beaucoup de plaisir à voir cette adaptation car elle capte parfaitement l’âme du roman et le restitue avec beaucoup d’énergie. Si vous n’avez pas lu le livre, vous risquez de ressortir de cette adaptation en ayant envie d’aller vous procurer un exemplaire du roman de Jane Austen ! Cette très belle adaptation est une réussite. Les lieux de tournage choisis font vraiment revivre les endroits qu’on a pu imaginer dans nos têtes et la magie opère pour ainsi dire toute seule. Une vraie plongée dans le monde de Jane Austen !

P.S : Je précise que le coffret DVD de la mini-série est disponible en français.