Le Cercle des plumes assassines, excellent roman policier de J.J. Murphy

Le cercle des plumes assassines-crg.inddA l’heure où les titres de romans rivalisent tous de ridicule ou bien d’hommages improbables à des titres de chansons, c’est rafraîchissant de tomber enfin sur un titre de livre qui fait envie ! Ce livre avait piqué ma curiosité quant je l’ai vu apparaître dans le catalogue des futures parutions des éditions BakerStreet en début d’année. Ce fut donc une très bonne surprise de découvrir que la maison d’édition me l’avait envoyé ! Car forcément, un roman policier mettant en scène Dorothy Parker elle-même, c’est une friandise littéraire à côté de laquelle je ne pouvais pas passer !

Pour tout de suite replacer les choses dans leur contexte, il faut dire que BakerStreet est une maison d’édition spécialisée plutôt dans les histoires policières, et avec une grande passion pour les littératures anglo-saxonnes. Ce roman fait donc coup double en offrant une histoire policière et un hommage aux grands auteurs new-yorkais de l’entre-deux guerres.

Nous sommes à New York dans les années 1920. En pleine époque de la Prohibition, un petit groupe d’auteurs sont autant obsédés par la quête d’un bon whisky que par celle du bon mot. Chroniqueurs pour les journaux les plus en vue de la ville, auteurs de théâtre, plumes aiguisées et tempérament bien trempé, ce petit groupe s’est lui-même baptisé Le Cercle Vicieux. Leur vice ? On ne sait pas trop si c’est l’alcool ou l’humour ravageur. Tous les jours, ils déjeunent ensemble dans l’un des restaurants les plus prisés de la ville, donnant ainsi le pouls de la vie intellectuelle de New York. Parmi les convives, la seule femme est Dorothy Parker, peut-être l’esprit le plus remarquable de toute la petite bande. Car avec son intelligence, son sens de l’observation et son humour corrosif, la dame n’est jamais en panne de répliques cinglantes. Mais la légèreté va laisser place au drame le jour où un cadavre est retrouvé sous la table du Cercle Vicieux : l’un de leurs concurrents, un journaliste peu apprécié, est retrouvé assassiné. Et manque de chance, c’est le nouveau petit protégé de Dorothy, un certain William Faulkner, qui est suspecté. Pour faire la lumière sur cette histoire, Dorothy décide de prendre l’enquête en main… et emporte dans son sillon tout le petit groupe du Cercle Vicieux qui ne dit jamais non à une bonne histoire !

Difficile de ne pas trop en dire sur ce livre qui, dès les premières pages, plante un décor de carte postale fascinant. On plonge littéralement dans le New York de l’époque, passant de restaurants en théâtres, de rues sordides en bars clandestins, de taxis en rames de métro. Murphy réussit à merveille à faire revivre un milieu devenu légendaire. Un exploit d’autant plus méritoire que, même si vous ne connaissez aucune des figures littéraires de ce livre, vous vous attacherez quand même très facilement à eux. Murphy utilise aussi bien des personnes réelles que des personnages de fiction, le tout dans une histoire inventée de toute pièce et très bien menée.

Le point essentiel de ce roman, ce sont les personnages. Dorothy Parker ressuscite sous nos yeux pour mener cette enquête tambour battant. L’auteur fait quelques allusions à la vie privée de la célèbre auteure, mais il reste à la surface car son propos est de divertir, et pas de dresser une biographie fidèle. Malgré cela, il restitue à la perfection l’état d’esprit de Dorothy, son dynamisme, son humour, son anti-conformisme… D’emblée, elle apparaît très attachante et on la suit dans ses aventures avec un immense plaisir.

Aux côtés de Dorothy, on découvre avec bonheur Benchley et Faulkner. Le premier est déjà un auteur bien installé, et en tant qu’ami proche de Dorothy, il la suit aveuglément dans cette histoire incroyable. Le second est un tout jeune homme qui débarque de son Sud natal pour découvrir la grande ville. Il ne va pas être déçu du voyage. Les autres illustres auteurs forment une galerie de personnages secondaires hauts en couleurs (avec une mention spéciale pour Woollcott, aussi irritant que drôle).

Au fil des pages et des multiples rebondissements de l’histoire, le lecteur croise également des policiers peu amènes, des mafieux, un petit chien, un tueur à gages et Douglas Fairbanks qui, à l’occasion, fait le liftier ! Les scènes s’enchaînent très rapidement et avec fluidité, les scènes de purs dialogues (pour l’humour) alternant avec les scènes d’action (pour faire avance l’intrigue). Le suspens est là jusqu’au bout, avec une excellente scène de course-poursuite qui permet, dans la dernière partie du roman, d’ajouter encore plus d’intensité à l’histoire. J’ajoute que les amateurs de romans policiers remarqueront quelques clins d’oeil amusants au genre policier : par exemple, vers la fin du livre, un déjeuner organisé par le Cercle Vicieux tente de rassembler tout le monde au même endroit afin de confondre le tueur devant l’assemblée. Une jolie référence à ce procédé d’exposition souvent utilisé par Agatha Christie.

Ce roman a largement été à la hauteur de que j’en attendais. J’espérais tomber sur un bon livre : il s’est avéré être un très bon livre. J’ai passé un très bon moment en compagnie de Dorothy, de Benchley et de Faulkner, à tel point que je les ai quitté à regret. La bonne nouvelle, c’est que J.J. Murphy a déjà écrit d’autres livres mettant en scène Dorothy Parker et ses amis dans d’autres aventures policières. J’espère donc que les éditions BakerStreet les publieront également.

En attendant, je vous souhaite à tous une très bonne lecture.

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